On discute encore, comme pour l’œuvre de Shakespeare, de savoir si le Daode jing est l’œuvre d’un homme ou de plusieurs. Il se présente comme un recueil d’aphorismes souvent concis, parfois sibyllins, dont l’accès au sens, comme les Koans Zen, est le résultat d’une expérience personnelle passant par la méditation. Il est traditionnellement divisé en deux parties, la première consacrée au Tao, la seconde à la Voie, mais ce n’est probablement pas son état originaire.
Le premier chapitre de Lao zi est célèbre et fondamental :
« La voie vraiment Voie est autre qu’une voie constante.
Les Termes vraiment Termes sont autres que des termes constants.
Le terme Non-être indique le commencement du Ciel et de la Terre ; le terme Etre indique la mère des dix mille choses.
Aussi est-ce par l’alternance constante entre le Non-Etre et l’Etre,
que de l’un, on verra le prodige et, de l’autre, on verra les bornes.
Ces deux, bien qu’ils aient une origine commune, sont désignés par des termes différents.
Ce qu’ils ont en commun, je l’appelle le Mystère, le Mystère Suprême, la porte de tous les prodiges. »
(Traduction de J.J.L. Duyvendak)
Le texte parle de l’inadéquation du langage (« les Termes »), et du fait qu’une pensée binaire (oscillant entre Non Etre et Etre) est incapable de saisir l’absolu. Il faut lier les deux points de vue antagonistes en une vision binoculaire. Cette logique bivalente domine la pensée taoïste. Thèse et antithèse doivent être vues sous leur aspect d’opposition dynamique en même temps que de complémentarité inscrite dans une totalité Une (ce que symbolise la réunion du Yin et du Yang dans le symbole du Taï Chi).